Le deuil
Je n'ai pas d'élément pour faire mon deuil, pas de corps à pleurer, pas de tombe sur laquelle aller.
Je sais ... que Bérénice n'est plus là ; je sens ... que Bérénice ne sera définitivement plus jamais là. Je sais que si je la retrouve un jour, ce ne sera certes pas dans cet univers ; tout au mieux dans un autre monde .. un monde meilleur , j'espère.
Le deuil passe par cinq étapes .
1-Le dénie
2-La colère
3-La dépression
4-La résignation
5-L'acceptation
Sans que je le réalise bien et sans que je le veuille ; je me rends compte que je suis passée par ces cinq étapes.
LE DENIE :
Elle ne peut pas avoir disparu ainsi ! Elle ne peut pas s'être évaporée de cette façon. Il lui est forcement arrivé quelque chose de concret ! Quelque chose qu'elle n'a pas pu, elle, maîtriser. Elle ne peut pas s'être suicidée, elle ne peut pas avoir eu envie de tout quitter. C'est le dénie complet, parce que son tempérament et son caractère ne nous permettent pas d'envisager l'une ou l'autre de ces deux possibilités. Ce n'est pas que je refuse de l'envisager, c'est simplement que ça ne peut même pas être envisageable compte-tenu des éléments de notre connaissance.
LE COLERE :
Pourquoi cela lui est-il arrivé à elle ? Il y a tellement de gens mauvais, inutiles dans la société, inutiles pour personne … Tant de gens méritent la mort, tant de gens méritent de disparaître ; PAS MA FILLE ! Cela ne devait pas lui arriver à elle ! Et la colère prend encore plus d'ampleur au fil du temps qui nous laisse toujours sans explication.
LA DEPRESSION :
La dépression m'a plongé dans un état de désespoir, de désespérance complet et total ; dont j'ai cru ne jamais sortir. Plus rien ne m'intéressait dans la vie. J'ai eu tendance un temps à l'enfermement, physique et moral. Ne plus trouver d'interêt à rien lorsqu'on est quelqu'un de passionné, c'est le fond de l'abîme ! Voir autour de soi ceux qu'on aime plus que tout, et avoir pourtant l'impression qu'on évolu dans un brouillard qui ne s'estompe pas, et dans lequel on ne voit plus personne. Ne plus voir ni réaliser les choses simples de la vie telles qu'elles sont vraiment ; être détachée de toute chose en permanence. Vouloir que la terre s'ouvre sous nos pas et nous avale totalement. On n'échappe pas à cet état dépressif. On apprend à vivre avec car on sait qu'il sera présent jusqu'à la fin des temps. Réussir à le gérer, c'est déjà énorme !
LA RESIGNATION :
C'est comme ça … je n'y peux rien ; personne n'y peut quoi que ce soit ! La situation restera ainsi indéfiniment. Je devrai vivre avec ma fille qui est disparue. Vivre sans la voir, sans lui parler, sans plus jamais la prendre dans mes bras. J'aurais voulu que la terre s'arrête ; mais elle a continué à tourner ; et j'ai continué à tourner avec elle, plutôt que de rester en décallage et peiner encore plus les autres. Alors je me suis résignée à ce que ma vie soit ainsi maintenant.
L'ACCEPTATION :
Après la résignation, il y a l'acceptation de la situation.
On commence à s'habituer à ce que notre enfant ne soit plus là. On s'habitue à la douleur de ce manque. On s'habitue à vivre ainsi. Accepter cette nouvelle dimension de notre vie est ce qu'il y a de plus difficile ; mais à un moment, ça se fait tout seul. Tout simplement parce qu'on n'est pas décisionnaire dans ce cas là.
J'ajouterais une sixième étape : LA RECONSTRUCTION
L'acceptation n'est pas suffisant. Après une perte, il faut aussi se reconstruire.
Parce qu'on ré-évalue ses priorités, on se ré-organise différemment, face à sa vie en société. Il faut reconstruire une nouvelle vie, parce que l'ancienne n'existe définitivement plus. Il y a l'avant et l'après.
Me reconstruire m'a amené à mieux me connaître, accepter certaines choses, me découvrir des ressources inimaginables ; et prendre conscience de mon existence ; développer encore plus d'énergie pour la vie en elle-même. Lui donner une valeur extrèmement importante, et profiter au maximum des autres.
C'est tout ça "faire son deuil". Et sans m'en rendre compte, j'ai entamé ce deuil ; même si je n'ai pas de corps à pleurer, pas de tombe sur laquelle aller.
Mais on ne fait son deuil que de la situation. Car on ne fait jamais son deuil de la personne. On reste éternellement en manque. Et je resterai à jamais éternellement en manque de ma fille.
On dit que la notion de temps au paradis n'existe pas ...
attends juste quelques instants mon bébé...
et on se retrouvera pour l'éternité...
Vole .. vole mon amour
Puisque ce monde est trop lourd
Vole à ton dernier voyage
Vole à travers les nuages
Va-t-en loin, va-t-en sereine
Qu'ici rien ne te retienne
Quitte ce monde de misère
Va mon ange, va rejoindre la lumière
Et emporte avec toi
Tout l'amour que l'on a pour toi.
Mon cœur reste rempli de toi mon amour
Maintenant et pour toujours